À portée de bec


Il n'est pas besoin d'être grand ni de savoir voler pour finir les restes de cerises des corbeaux.

Animal de compagnie


Mener une vie de chien, manger comme un porc, faire le singe, être rusé comme un renard, devenir petit à petit l'animal de notre compagnie.

La vie est un tas de bûches


Vivre c'est comme entasser du bois. Sortir se blottir contre la glace et prendre tout ce qu'on peut emporter de précieux dans nos bras. Ne pas sous estimer les brindilles. Les plus petites brindilles font les plus gros feux. Rentrer au chaud et faire le point. Trier, ranger, jeter, brûler. Ressortir dans les heures froides, et ne rien voir d'autre que les bûches. S'emparer des plus belles. Les stocker au chaud pour vivre tranquille un moment, entre un feu grassouillet et des sourires menus. Alors la mort n'est plus que la fin d'un tas de bûches qu'on a mis tout l'hiver à brûler.

Équilibre bancal


Nous sommes des mésanges sur le fil du rasoir.

Range ta chambre


La pluie a joué avec la nuit, dehors est un désordre de branches et de flaques. Après les nuits d'orage, flotte toujours cette sensation d'être un enfant à qui on vient de dire "range ta chambre".

Gardien de phare


Le soir même il était décidé. Quand il lui a annoncé la nouvelle, elle a perdu pied et ses deux petits yeux se sont transformés en nuages noirs. Il y avait réfléchi longtemps, il y pensait jour et nuit, et aujourd'hui sa décision était prise. Cela faisait des années qu'il rêvait d'être gardien de phare, mais les places coûtaient cher. Aussi venait-il de se créer un poste. Seul, sans l'aide de quiconque. À la force de ses maigres idées. Il avait rassemblé ses affaires et est entré dans la cuisine, avec scotché autour de la tête une lampe torche qui illuminait tout ce qu'il fixait du regard. Il l'a regardée dans les yeux. La lumière a inondé ses rétines en crue, et il lui a dit qu'il partait pour de bon, que les moustiques avaient besoin de lui, qu'il allait enfin devenir un phare pour empêcher les insectes de foncer antennes baissées sur les pare-brise des voyageurs de la nuit. Elle l'a pris pour un fou, quelques secondes, puis lui a proposé de le changer, de faire un roulement. Plus tard dans la soirée, ils partaient tous les deux, chacun une lampe torche vissée sur la tête, dans la bouche pleine de moustiques de la nuit.

Question de point de vue


À partir de quelle hauteur peut-on qualifier le bond d'une sauterelle de tentative de suicide ?

Fin du monde


Il y a dans les maux de gorge des dimanches ensoleillés des extraits  microscopiques de fin du monde.

Courbe d'un cil


Quand la courbe d'un cil tente de rejoindre
la rive opposée d'un œil en pleur.

Sac de nœuds


Alors apparaîtra clairement
la simple complexité des choses  futiles.

Une chronique sur Boucle d'oeil


Une chouette chronique sur "Boucle d'œil" à lire ICI

Gloup gloup


.setiurt sed ruop tnennerp es iuq tnaruoc-ertnoc à stom seD

Snif


Je renifle, tu renifles, il renifle, nous reniflons, vous reniflez, ils reniflent, et la terre est un énorme mouchoir froissé dans la poche de l'univers.

Ce n'est pas tout à fait ça

© photo : Yasir82

Ce n'est pas qu'elle danse, mais autour d'elle les choses s'arrêtent. Ce n'est pas quelle rit, c'est l'automne qui sombre dans la mélancolie. Ce n'est pas qu'elle dort, mais les autres vont tellement vite, qu'elle préfère laisser sa grâce flotter dans le sillage de leur tristesse.

La truffe


Longer les murs et trainer la patte. Avancer contre le cours des choses, contre le vent. Main dans la main avec les hologrammes du destin allongés dans les lueurs vespérales. Mettre un pas devant l'autre, ne pas s'asseoir, avancer. Être au bout de la laisse et tirer, toujours vers l'horizon, les yeux enroulés sur les cimes. Ne rien attendre d'autre qu'un bond en avant, qu'un croc dans la chair. Chercher le trou, chercher, chercher, coller son museau assez près du sol pour entendre le chant des morts perforer nos oreilles. Ne plus reculer, jamais, ne plus voir se qui se défait derrière nous. Puis la trouver enfin au fond du trou, la mort et son odeur de truffe, la truffe et son odeur de mort.

SOS


Aujourd'hui mon cerveau était une île déserte, jusqu'à ce que j'aperçoive au loin, dans l'écume du ciel, un oiseau venu à ma rescousse pour m'aider à écrire ce minuscule poème.

De bonne guerre


L'armée de tes cheveux envahit le ciel d'été, et je reste à attendre, planqué dans la tranchée ombrageuse des peupliers. C'est une guerre interminable aux blessures supportables. Parfois il est bon d'être un homme des fossés.

Hésitations du ciel


Ce matin le ciel est une hésitation entre la parka du désert et le maillot de banquise.

Jours étranges


Il n'a pas trouvé ça étrange, que les oiseaux miaulent et que les chats aboient, que les chiens rampent et que les insectes hurlent. Il n'a pas trouvé ça étrange que le ciel soit figé, que les arbres pleurent et se mouchent dans leurs feuilles. C'était une journée presque comme les autres, à quelques vacarmes près. Il s'est contenté de prendre quelques photos, ses cinq yeux plantés dans l'objectif, avant de rentrer au terrier. Ses neuf pattes sanglantes faisaient craquer la neige fraîche, et il ne savait plus bien où donner de ses six têtes.

L'anarchie dans tes yeux


Je voudrais être cette anarchie dans tes yeux, qui se contente de fabriquer des petits reflets plus jolis de la réalité du monde.

Lequel ?

© photo : Arno Rafael Minkkinen

De l'homme et du monde, lequel est le fusil et lequel est la balle ? Lequel est la monture et lequel est le cavalier ? Lequel est le trou et lequel est le cadavre ? Lequel est le plus sucré ?

De bas en haut


Il y avait quelque chose dans la façon dont elle remontait ses bas qui était proche du road-trip de jambes en l'air.

Participation


Un p'tit poème chez NON DE NON !

Hémorragie champêtre


Les coquelicots faisaient les tâches de sang et nous étions des garrots allongés de tout notre long sur la peau fraîche des herbes d'été.

Les chiens des vieux


*Les chiens des vieux transportent leurs souvenirs.
*Les vieux sont des voitures, leurs chiens des boîtes de conserve.
*La laisse représenterait la complicité entre les vieux et leurs chiens.
*Les chiens et les vieux ne sont qu'un seul et même animal. Un chien d'aveugle pour les enfants.
*Les chiens sont en sécurité avec leurs vieux.
*Les vieux ne sortent jamais sans leurs chiens, et vice et versa.
*Les vieux, des chiens doux qui ont perdu leurs crocs et leurs poils dans des combats avec la nuit.
*Plus les chiens sont vieux, plus les vieux sont chiens.
*Les chiens ont sur le bout de la langue des histoires d'amour pour les vieux.

Monstre marin


Alluvions dans les mâchoires de la mer, shampooing naturel des mouettes sur l'épi des vagues, épaves sous-marines aux formes intestinales. Plus loin les proies endormies sous les coquilles de tuiles.

Détournement grammaticalo-temporel


Les jours me suffisent à eux même.

Poème d'amour à la fraise

© photo : Anibal

Tu es une fraise des bois, je parle de ton goût et de ta couleur, des pépins sur ta peau et du jus dans tes veines, tu es une fraise des bois au milieu d'un champ de fraisiers communs.

Ligne grise

© photo : Mike Bradshaw

La lueur des nuits, l'ombre des jours, la couleur bâtarde de l'existence, la ligne grise entre l'enfant et le vieillard.

Pas mieux que ça

© photo : Ingrid Delberghe

On ne vaut pas mieux que ces paysages funestes d'été qui font tout pour ne pas ressembler à des matins d'hiver.

La faucille et le corbeau


Il s'est posé sur le lampadaire. De ma fenêtre je ne voyais que sa tête et la longue faucille de son bec. Il était d'un noir dense, placardé sur le ciel. J'ai vu ce corbeau grignoter assez de lumière pour se fondre dans le matin gris, avant de repartir comme il était venu, les ailes grandes ouvertes dans le silence.

Participation


Participation à lire sur le site des Etats civils

Idées de métiers pour une autre vie


Funambule sur ligne d'horizon, cracheur de brume, lanceur de rapaces, contorsionniste d'herbes à poux, souffleur de bois, collectionneur de rosée, gonfleur de cœurs, pilote d'écureuil.

Il tombe des cordes


Il pleut des cordes
à se mettre des gouttes d'eau autour du cou.

Effervescence

© photo : Javiy

Nos yeux des comprimés effervescents
Leurs regards des verres d'eau.

Quand les choses rampent


Souvent je me lève quand les choses rampent. Quand la lumière englue le paysage, quand les ombres glissent sur les petites parcelles d'éclaircies. Quand des animaux presque morts rejoignent leur progéniture presque vivante. Souvent je me lève quand les choses rampent. Quand la poussière construit des dunes sur les contours des objets de la chambre. Quand elle longe les murs pour relier un point A inutile à un point B aussi futile. Souvent quand je me lève je suis une de ces choses-là, qui rampe péniblement hors de son lit comme elle essaierait de quitter un champ de bataille.

Adultère naturel


J'embrasse des yeux les lèvres tendres de l'horizon, et la minute d'après m'envoie en l'air avec un harem de nuages. Je fornique à droite à gauche de bon matin dans la plaine qui m'en fout plein la vue.

Heures d'accalmie


Les heures d'accalmie seraient des brochettes de guimauve, il n'y en aurait pas pour tout le monde, le feu ne serait pas loin. L'impatience deviendrait une peau moite et des perles de sueur égarées sur les fronts. Nous attendrions que tout ça se calme, avec pour seuls préaux nos sourcils froncés. Les premières minutes sèches reviendraient à s'enfiler toute une brochette de guimauve sous les yeux des perdants.

Faire l'amour autrement


Il est persuadé qu'on peut faire l'amour à une femme juste en la croisant. Simplement en la frôlant assez rapidement pour sentir son parfum léger pénétrer au fond de ses poumons.

Le ciel et le sol


On pourra toujours manger l'horizon, nos pas aiguisés, nos peines affutées. Lécher de nos mains les contours indélicats du très loin. Avaler tout cru les ombres, ne faire qu'une bouchée des proies végétales, boire des yeux les silhouettes des mares et bouffer leurs canards. On pourra toujours se faire un festin de mets calcinés quand le ciel et le sol auront enfin échangé leurs places.

Eaux froides


Chute vers les heures humides. La nuit un grand plongeoir. Le réveil un saut dans les eaux froides d'hier.

Participation


Un poème très cruel chez FPDV

Ça ressemblerait à ça

© photo :Visionsofmils

S'évader ressemblerait à ça. Ouvrir grande la fenêtre de la chambre et voir s'envoler des milliers de chats vers le fond impénétrable des rivières alentour.

Tableaux de maîtres


Tout autour, des toits d'ardoise à perte de vue. Des tableaux de maîtres monumentaux aspirés par le ciel, qui n'attendent que nos yeux de craie pour y inscrire les formules des jours réussis.

Changement de cap


Il y a une bonne poignée d'années, j'ai gagné deux ou trois courses à pied. J'ai couru, pas très longtemps mais j'ai couru, après des médailles en toc et des podiums en carton. C'est tellement loin pour moi que j'ai l'impression que c'était quelqu'un d'autre. Et puis il y a eu cette prise de conscience, ce changement de cap heureux et bienfaiteur, cette envie de tout arrêter pour finalement marcher tranquillement après rien du tout, la clope au bec.

Choix d'orientation


Certains matins sont des choix difficiles d'orientation, des hésitations entre le métier de boucher et celui de fleuriste.

Lunettes 3D


Tous les goûts sont dans la nature des sentiments qu'il éprouve pour cette fille. Son amour est un mélange de peste et de choléra. Il est un roi aveugle pourvu de lunettes 3D.

Envol de ballon

Voyez-vous, j'ai écrit ce poème comme j'aurais gonflé un ballon de baudruche, à l'hélium. Un beau ballon rouge auquel j'aurais ajouté cette étiquette :


en espérant qu'il ferait le tour du monde et qu'il me reviendrait des cartes postales de tous les coins de la planète. De tous les endroits perdus ou non, que je n'aurai peut être jamais l'occasion de visiter. C'est vrai quoi, c'est pénible à la fin de voir ses poèmes voyager sans savoir jamais chez qui ils atterrissent.

Elle y arrive toute seule

© photo : Paulo Nozolino

La nuit n'a pas besoin de nous pour recouvrir d'un drap la peau écorchée des souvenirs.

Provocation gratuite


Ce poème fera sans doute s'indigner des gens.
J'en prends le risque.