Sa revanche


Avant de pouvoir ronger
la moelle de nos os
la mort doit se faire battre
une vie entière
par nos cœurs

Formule magique


39 miettes de pain
une coccinelle crevée
un gravier
5 cheveux
un cil
un ongle
un bout de fil
une griffe de chat
voilà à peu près
tout ce que je sais
de la formule magique
du sac d'aspirateur

Une histoire de toupies


L'orage et
les araignées
la font bien
un peu flipper
mais ce qui l'effraie
par dessus tout
c'est que
la terre tourne
plus vite
que la chance

Mains au chocolat


C'est comme
s'il avait pris l'habitude
de se contenter
de pain rassis
et d'eau tiède
et que cette journée
était arrivée
les mains pleines
de chocolat fondu

Préparer notre fuite


Les temps sont durs
mais le ciel est doux
Nous ferions mieux
d'habiter un nuage
et de sauter dans
la première
étoile filante

La ponctualité des averses


Le réveil vient de sonner et dehors se sert de la pluie pour effrayer nos courages branlants. Tout ça essaie de me secouer à travers les vitres, mais ma torpeur tient bon. Je n'en suis pas à mon coup d'essai. J'ai affronté pas mal d'averses à distance depuis que nous sommes ici. Au fond du lit tout est possible. Au fond du lit on peut devenir chevalier de pas mal de choses. Tu t'es levée une fois de plus et comme pour t'habituer à ce qui t'attendais dehors tu as sauté sous la douche. Il y a maintenant deux pluies pour me faire sortir de ma planque. Une petite pluie fine dirigée par ton corps, et la grosse pluie dehors qui attend que quelqu'un passe le pas de la porte pour lui foutre sur la gueule. On ne devrait pas avoir à se prendre deux averses de suite sur la tronche avant d'aller travailler. Pourtant bientôt je devrai en faire autant. Les contraintes dorment moins longtemps que la paresse. Chaque jour je te laisse faire l'éclaireuse. Quand tu es partie je me glisse sous la première pluie, celle qui porte encore l'odeur douce de ton parfum. C'est la deuxième pluie qui me fait peur. J'aimerais simplement attendre qu'il neige. La neige n'oblige à rien. Et je ne suis pas encore prêt à traverser deux averses pour rejoindre l'orage.

Taxe épistolaire


Ma petite catin adorée,

Je ne t'oublie pas
Je pense souvent à toi
Ce matin
j'ai retrouvé
cette lettre de toi
tachée de
confiture de myrtille
qui disait
Date limite de paiement :
15/11/2011

La foule idéale


Tu es la foule
la plus déterminée
à laquelle
je me sois mêlé
Une foule constituée
d'une seule personne
capable de porter
un homme chancelant
sans piétiner
ses rêves

Interrogatoire sous l'Abat-Jour


Je réponds à quelques questions 
posées par Marianne Desroziers, 
pour le compte des Editions de l'Abat-Jour.
C'est également à lire sur son site

Nécrologie - Denis Trumper


La nécrologie de Denis Trumper, le roi de la luge, 
est à lire aujourd'hui chez

Reviens au galop


Tu es partie
petit cheval
au galop
dans le brouillard
et ta disparition
a donné à ma bouche
la forme d'un lasso

Mauvais rêve


La tête
dans le cul
des nuages

Bien essayé


Les températures hésitent
plongent et
refont surface
La cordialité de l'automne
parvient encore
à prendre le dessus
L'hiver me fait penser
à ce moineau têtu
venu hier se cogner la tête
contre un mur en béton
avant de repartir
un peu sonné
et le vol de travers
comme si de rien n'était
attendant simplement
son heure
pour retenter sa chance

Chats borgnes numériques


Mon premier recueil, "Poèmes pour les chats borgnes",
est maintenant disponible en version numérique pour 4 euros.
Pour le commander, c'est par ICI.
Il est également toujours possible de commander la version papier (7 euros) sur le site des éditions Asphodèle, ou bien en m'envoyant un mail directement.

Quatrième de couverture:

C'est étrange d'écrire pour les chats.
Voici quand même quelques poèmes
pour les chats de gouttières,
parce que je me dis qu'il y a peut-être encore
des chats borgnes qui lisent,
la nuit, entre deux combats.

Poèmes pour les chats borgnes / 52 pages / janvier 2010

Costard de poisson


Ce type
empaqueté
dans son costard
étriqué
comme un poisson
dans l'eau
d'un bocal exigu

Sabotage de routine


Ce n'est pas
la première fois
que j'essaie de
faire dérailler
un petit train-train

Poches trouées


Perdre
ses cheveux
ses dents
des souvenirs en forme
de gâteaux au chocolat
des idées ou
des paires
de mains et d'yeux
qui ont beaucoup
trop compté
n'impressionne
pas plus que ça
dans le fond
Le plus effrayant
est de ne jamais plus
devoir les retrouver

Collègues de travail


Dans la cuisine
je m'attaque à
l'évier  plein
de vaisselle sale
Dehors le ciel
s'occupe du sol
Nous comptons
l'un sur l'autre
pour que tout soit brillant
quand le soleil
reviendra

Variation sur décharge publique


Se réveiller là-bas

Se réveiller au milieu
de la décharge publique
apercevoir des oiseaux glacés
manquer de piétiner
un rat pétrifié
contempler son petit corps
sur la touche
Entendre les voitures de la nationale
leur prêter
le son d'une armée de dinosaures
manger avec ses mains
avec ses yeux
avec ses oreilles
Dévorer chaque bruit
et chaque odeur de fuel
chaque variation du ciel
suivre de près la vie d'une mauvaise herbe
n'attendre rien
ni personne pour
se soumettre à la tentation
juste se réveiller au milieu
de la décharge publique
où chaque jour qui se lève
parvient encore à lui faire croire
qu'il est vivant

*****

Espionnage de bruits

Cette nuit
ses oreilles ont surpris
le vent occupé 
à capturer
une légion de feuilles mortes
le grillage de la décharge
tricoter avec habileté
le noir
quelques petits animaux
faire danser leurs pattes
avec la terre
Cette nuit
ses oreilles ont pris
la main dans le sac
le cri d'une vieille chouette
sur la fin
implorant quelques étoiles
le moteur d'une voiture
enguirlander le silence
et la trace d'un écho lointain
qui disait
"il est l'heure de rentrer maintenant
laisse la nuit tranquille"


*****

Souvenirs en boîte

Un souvenir lui souffle
ne touche pas c'est sale
ne mets pas tes mains par terre
ne mange pas ce qui est tombé
ne marche pas pieds-nus
ne colle pas tes lèvres
contre la vitre
lave-toi les mains
jette ça à la poubelle
mais il sait qu'à la décharge
les souvenirs finissent
tôt ou tard
comme les boîtes de conserve

Lecture sous l'Abat-Jour


Si vos oreilles supportent pas mal de choses, vous pouvez vous rendre sur le site des éditions de l'Abat-Jour, où je fais la lecture d'une de mes nouvelles, "Une fin d'après-midi mathématique".
Ça se passe ICI.

Testament d'une fin de grasse matinée


Je lègue
à ce qu'il reste
de cette journée
toute la flemme contenue
dans ce premier
et interminable
bâillement

Miettes de casse-cou


Sa vie aurait vraiment 
été plus simple
s'il ne l'avait
jamais croisée
Mais certaines rencontres
vous sortent
les doigts du cul
et aujourd'hui
celui qui parvient
à libérer de l'adrénaline
sur un escabeau à trois marches
se réjouit de penser que
l'aimer est
la plus grosse cascade
qu'il ait jamais réalisée

Au milieu de la ronde


Tout ce qu'il ne faut pas dire
tout ce qu'il ne faut pas faire
tout ce qu'il ne faut pas entendre
tout ce qu'il ne faut pas voir
tout qu'il ne faut pas croire
Et au milieu de la ronde
le va et vient cahotant
de nos convictions

La dernière traversée


Il avait traversé
des mers hostiles
des montagnes abruptes
des forêts emmêlées
des déserts avec
des braises rouges
sur les épaules
et des fleuves
pleins de dents
mais aujourd'hui
il lui était impossible
de voir le bout
de cette petite
dépression

Pari sur les bourrasques


Aussi souvent
que possible
j'essaie d'assister
aux combats organisés
entre le vent
et la poussière

Bec et ongles


Il faut prendre
certaines mains
comme on ramasse
un oisillon
tombé du nid

Fil de mémoire


Ces souvenirs
gringalets
pas plus épais qu'un fil
capables de soulever
un homme

Quand le grizzly ouvrira les yeux


Il s'assoit devant la fenêtre de la cuisine. Le ciel est encore un grizzly en hivernation, une grosse bête poilue endormie sur une branche d'horizon. Alors il graisse ses tartines, commence à les tremper dans son café, sans oublier de rester concentré sur ce qui se passe à l'extérieur. Il attend que quelque chose bouge dehors, ne mange pas trop vite, garde quelques bouchées pour ne pas manquer un seul instant du moment privilégié qui se dessine. Laisse l'ours brun se réveiller tranquillement. Dans quelques secondes, et comme tous les matins, il pourra enfin prendre son petit déjeuner à la vitesse de la lumière.

Avant de redescendre


Les jours montent
les nuits descendent
et nos derniers mots
échangés
avant d'éteindre la lumière
ont la douceur
d'un feu de camp
au sommet

Tour de passe-passe


S'asseoir
sur les genoux
de ce qui nous tombe
sur les épaules

Cours d'envol


Quand cette fille
sourit
on dirait
qu'elle apprend
aux mecs
à voler

Carmen cover


Leur amour est
un enfant de bohème
orphelin

Une fois dedans elle est bonne


Il n'y a pas
de bonne
ou de mauvaise saison
il n'y a que des jours
aux reflets divergents
dans lesquels
le cœur plonge
plus ou moins
facilement

Comme il fait son intéressant


Pour se relever
avec la même régularité
et la même hargne
au fond de l'horizon
je soupçonne le jour
de tout miser sur
l'attention qu'on lui prête

Dans son laboratoire


Chaque sursis
que la vie nous octroie
lui sert à perfectionner
nos tristes dénouements

Sur le retour


Ils étaient
sur la route du retour
Il faisait nuit
la voiture avait pris
un rythme de pachyderme
sous amphétamine
Ils ne parlaient pas beaucoup
mais la nuit
en voiture
personne ne parle beaucoup
surtout quand il s'en revient
avec dans le coffre
toute la vie
d'un mort

Pour ne pas rentrer bredouille


L'amour est une belle prise, la lumière est une belle prise, l'évasion est une belle prise, tes yeux sont une belle prise, l'envie est une belle prise, ce souvenir est une belle prise, ton sourire est une belle prise, la fleur solitaire des fossés est une belle prise, le jour nouveau est une belle prise, le repos est une belle prise, l'horizon est une belle prise. Me reste plus qu'à appâter toutes ces années qui filent entre les doigts.

Les jours de grands départs


Les grands départs
laissent sur le carreau
nos retrouvailles
tripes à l'air

Dans 98,6 % des cas


Tout n'est pas
toujours
tout beau tout rose
et heureusement
qu'un coup d’œil
jeté loin dehors dans
un mouvement circulaire
apporte
dans 98,6 % des cas
une douceur comparable
à celle d'un morceau
de barbe à papa
sur la langue

Selon ses dernières volontés

Ratures


Le poids des choses
est à lire sur le site de Ratures

Saupoudrage


L'ennui dépose
de la glace
au fond des poches
et de la poussière
au bord des yeux

Visages en morceaux


Rien n'est plus friable
qu'un visage errant
loin de nos yeux
depuis trop longtemps

Pitch and putt

© photo : Norman Parkinson

Jouer au golf
avec une idée arrêtée
et un trou de mémoire

La loi de la jungle urbaine

© photo : Tim Allen

Un couple d'inconnus
attend sous l'abri bus
la fin de la pluie
Il lui fait de l’œil
essaie d'attirer son attention
mais la fille ne réagit pas
et la pluie n'en finit pas
de passer sous leurs yeux
comme des milliards de bus
minuscules et transparents
qui ne transporteraient rien
Alors il retente le coup
et son œil s'agrippe
à l'épaule de la fille
Pourtant rien
aucune prise
aucune réaction
Il abandonne

Fruit d'un même destin
impitoyable
ou étrange coïncidence ?

À plusieurs milliers de kilomètres
de là
quand un lion essaie
de faire la cour
à une gazelle
il rencontre fatalement
le même problème

Temps de chien


Un temps de chien vous attend aujourd'hui chez FPDV

Un peu de ménage


"Un peu de ménage" "En attendant Godot"
sur le nouveau projet Pastiches
piloté par Franck Garot et Joachim Séné

Nécrologie - Elisabetha Estrella


La nécrologie (bien méritée...) d'Elisabetha Estrella, 
est à lire dans le Grand bazart d'ICI !

Ma petite tribu


Tu es une petite tribu
gaillarde
assise sur le rebord
de ma solitude

Pour qu'il mange dans nos mains


Nous apprivoisons
chaque lieu
en lui sacrifiant
notre regard